Une commune peut-elle souscrire une convention de servitude pour l’implantation de réseaux sous un chemin rural lui appartenant ?

L’article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime définit les chemins ruraux comme étant des chemins appartenant aux communes, affectés à l’usage du public et qui n’ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune. L’article D. 161-15 du code rural dispose que « nul ne peut, sans autorisation délivrée par le maire, faire aucun ouvrage sur les chemins ruraux et notamment ouvrir sur le sol de ces chemins ou de leurs dépendances, aucune fouille ou tranchée ou enlever de l’herbe, de la terre, du gravier, du sable ou autres matériaux, y installer des canalisations, y faire aucun dépôt, de quelque nature que ce soit, y étendre aucune espèce de produits ou matières ». Le maire peut donc autoriser aux riverains le passage de réseaux desservant les propriétés riveraines sous l’assiette du chemin rural, conformément à l’article L. 161-15 du code rural. Les riverains des chemins ruraux peuvent aussi connaître, outre la servitude de vue et la servitude pour les plantations (articles D. 161-22 à L. 161-24 du code rural), la servitude d’écoulement des eaux (droit d’égout ou aisance de voirie, articles L. 152-20 et D. 161-20 du code rural).

Code général de la propriété des personnes publiques ou code rural et de lapêche maritime pour une servitude sur un chemin rural?

Sans nécessairement se référer au code général de la propriété des personnes publiques, il peut être possible de se référer aux articles L. 152-1 et L. 152-3 du code rural qui prévoient que les collectivités publiques disposent, lorsqu’elles entreprennent des travaux d’établissement de canalisations d’eau potable ou d’évacuation d’eaux usées ou pluviales, ainsi que pour les besoins de l’irrigation, d’une servitude leur conférant le droit d’établir à demeure des canalisations souterraines dans les terrains privés non bâtis, excepté les cours et jardins attenant aux habitations. Or, le chemin rural fait partie du domaine privé de la commune. L’article L. 161-5 du code rural ajoute que l’autorité municipale « est chargée de la police et de la conservation des chemins ruraux », sans avoir cependant la charge d’une obligation d’entretien (Conseil d’État, 26 septembre 2012, n° 347068). L’entretien est effectivement facultatif puisque les dépenses y afférant ne sont pas incluses dans la liste des dépenses obligatoires de la commune. Il en découle l’impossibilité d’engager la responsabilité de la commune lorsque des dommages sont provoqués par le défaut d’entretien de ces chemins. Cependant, ce caractère facultatif est limité par la jurisprudence, notamment lorsque la commune a créé un précédent en effectuant des travaux destinés à assurer ou à améliorer la viabilité du chemin et à accepter, de ce même fait, d’en assurer l’entretien (CE, 25 octobre 1985, Wilhem). Même effet si, après avoir incorporé le chemin dans la voirie rurale, elle a exécuté des travaux, acceptant ainsi d’en assurer l’entretien (CE, 24 mars 2014, n° 359554).

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Il semble résulter de la lecture combinée des dispositions des articles L. 161-1, L. 152-1 et L. 152-3 du code rural que la commune soit en mesure d’utiliser des chemins ruraux, partie intégrante de son patrimoine privé pour faire établir des réseaux d’infrastructure. Cependant, il résulte également de la combinaison du code rural (article L. 161-5) et de la jurisprudence administrative que cela imposera à l’administration une obligation d’entretien régulier.

Source : réponse ministérielle n° 12595  :  JO Sénat 5 déc. 2019, p. 6035

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2 commentaires

Hibert · 01/23/2021 à 1:44 pm

J’ai un terrain agricole le maire m’empêche son accès depuis le chemin rural de la communauté que faire

    Maître Christophe Gourgues · 02/25/2021 à 4:46 pm

    Bonjour,
    Veuillez trouver ci-après la réponse à votre question, rédigée par notre conseiller scientifique, Denis ROCHARD.

    Les chemins ruraux ont été instaurés par une loi du 20 août 1881 ; leur statut juridique des chemins ruraux est repris aux articles L 161-1 et suivants du Code rural et de la pêche maritime.
    Pour la plupart situés en zones non urbanisées, juridiquement, les chemins ruraux se définissent comme des chemins affectés à l’usage public, mais appartenant au domaine privé de la commune et qui ne sont pas classés au titre des voies communales.
    Les chemins ruraux ont pour fonction de desservir les activités d’intérêt agricole. Mais leur accès est par principe libre, et ils peuvent également servir d’itinéraires de promenades ou de randonnées (article L 161-2 alinéa 2 du Code rural et de la pêche maritime) et permettent même, dans certains cas, de participer à la sauvegarde de la biodiversité.
    Les caractéristiques techniques générales sont décrites par l’alinéa 1 de l’article R 161-8 du Code rural et de la pêche maritime : « Les caractéristiques techniques générales des chemins ruraux sont fixées de manière à satisfaire, suivant les conditions imposées par la géographie des lieux et les structures agraires, à la nature et à l’importance des divers courants de desserte des terres et bâtiments d’exploitation tels qu’ils peuvent être déterminés dans le cadre d’une prévision d’ensemble des besoins de la commune, compte tenu des cultures pratiquées et des matériels utilisés ».
    Des préconisations sont ensuite listées, notamment concernant la largeur des plateformes, l’aménagement de surlargeurs, la gestion des eaux pluviales, etc…

    En matière de droits, sur les chemins ruraux, bien que leur affectation à l’usage public soit présumée, les communes peuvent décider de la circulation ou non sur ces chemins (article L 161-5 Code rural et de la pêche maritime), notamment par le biais d’arrêtés municipaux.

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