La loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010 a instauré un droit de préférence au profit des propriétaires voisins d’une parcelle ou propriété boisée lorsque cette dernière est mise en vente.

Les membres du GIE RURANOT reviennent sur ce droit de préférence du voisinage, soumis à des conditions et bénéficiant de nombreuses exceptions.

I. Le droit de préférence du voisinage

Pour pallier le morcellement des parcelles boisées, le droit de préférence des propriétaires de terrains boisés contigus a été créé en 2010 ; il est régi par les articles L 331-19 à L 331-21 du Code Forestier.

Selon l’article L 331-19 du Code Forestier, en cas de vente d’une propriété classée au cadastre en nature de bois et forêts et d’une superficie totale inférieure à quatre hectares, les propriétaires d’une parcelle boisée contiguë à celle mise en vente bénéficient d’un droit de préférence.

Ce droit de préférence s’applique si la vente porte sur une ou plusieurs parcelles de moins de quatre hectares ou en cas de vente de droits indivis ou de droits réels de jouissance sur ces parcelles.

Notifier l’intention de vendre

En pratique, le propriétaire qui a l’intention de céder sa parcelle doit le notifier à tous les propriétaires des parcelles boisées voisines. Cette information doit être réalisée par lettre recommandée avec avis de réception. Le prix et les conditions de la cession doivent être mentionnés.

Si, du fait d’un nombre important de propriétaires de parcelles contiguës, le nombre de notifications est égal ou supérieur à dix, le vendeur a la possibilité de rendre public ces informations liées à son projet de cession, par voie d’affichage en mairie durant un mois. Une annonce légale doit être publiée sur un support habilité à en recevoir.

Si le vendeur ne notifie pas son intention de céder son bien à ses voisins, la vente est considérée nulle. L’action en nullité se prescrit au bout de cinq ans. Elle ne peut être intentée que par ceux qui n’ont pas reçu de notification ou leurs ayants droits. (L 331-20 du Code Forestier).

L’exercice du droit de préférence

Lorsqu’un voisin souhaite exercer son droit de préférence, il dispose d’un délai de deux mois pour le faire savoir. Ce délai court à compter de la notification ou de l’affichage en mairie. Il doit être formulée au vendeur par lettre recommandé avec demande d’avis de réception ou par remise contre récépissé.

Dans le cas où plusieurs voisins veulent exercer leur droit de préférence, le vendeur peut choisir librement la personne à laquelle il souhaite transmettre son bien, et ce sans avoir à se justifier.

Ce droit de préférence du voisinage connaît plusieurs exceptions.

Exceptions au droit de préférence du voisinage

L’article L 331-21 du Code Forestier énonce les neuf exceptions au droit de préférence du voisinage.

Les principales sont les suivantes :

1. Vente à un voisin

Selon l’article L 331-21 du Code Forestier, le droit de préférence du voisinage ne s’applique pas si le vendeur a prévu de céder son bien à un voisin d’une parcelle boisée contiguë, qui aurait, par principe, bénéficié de ce droit de préférence.

2. Aménagement foncier rural

Lorsque la vente envisagée entre dans le champ d’application du Titre II du Livre Ier du Code rural et de la pêche maritime, relatif à l’aménagement foncier rural, le droit de préférence du voisinage ne s’applique pas non plus.

3. Vente à un membre de la « famille »

Si la vente doit être réalisée au profit du conjoint, partenaire de Pacs ou concubin, le droit de préférence ne s’applique pas. Il en est de même au profit des parents ou alliés du vendeur, jusqu’au quatrième degré inclus.

4. Projet d’utilité publique

Si la vente intervient dans le cadre d’un projet déclaré d’utilité publique ou au profit d’un conservatoire régional d’espaces naturels agréé, les voisins propriétaires d’une parcelle boisée contiguë ne bénéficient pas d’un droit de préférence.

5. Coindivisaire, nu-propriétaire ou usufruitier

Lorsque l’acquéreur envisagé se trouve être soit un coindivisaire de la parcelle objet de la vente, soit son usufruitier, soit son nu-propriétaire, le droit de préférence du voisinage ne s’applique pas.

6. Nature de la parcelle mise en vente

L’article L 331-21 du Code Forestier énonce que le droit de préférence du voisinage ne s’applique pas non plus si le bien mis en vente est :

  1. Un terrain classé entièrement au cadastre en nature de bois mais dont la partie réellement boisée représente moins de sa surface totale
  2. Une propriété qui comporte une ou plusieurs parcelles boisées et un ou plusieurs autres biens, bâtis ou non bâtis (ex : parcelle agricole, bâtiment   )
7. Carrières

Si la parcelle se situe dans un périmètre d’exploitation de carrières ou en contiguïté, le droit de préférence ne s’applique pas si la vente doit être réalisée au profit d’un exploitant de carrières ou d’un propriétaire de terrains à usage de carrières.

II. Le droit de préférence de la commune où se situe la parcelle

L’article L 331-24 du Code forestier, prévoit un droit de préférence au profit de la commune au sein de laquelle se situe le bien boisé mis en vente. Ce droit de préférence s’applique si la vente porte sur une ou plusieurs parcelles de moins de quatre hectares ou en cas de vente de droits indivis ou de droits réels de jouissance sur ces parcelles.

Il n’existe pas de condition de proximité pour que ce droit de préférence de la commune s’applique.

Ce droit de préférence de la commune est en concurrence avec le droit de préférence du voisinage.

Toutes les exceptions au droit de préférence du voisinage, mentionnées ci-dessus et prévues à l’article L 331-21 du Code forestier font obstacle au droit de préférence de la commune.

Qu’il s’agisse du droit de préférence des voisins ou de celui de la commune, si l’on se trouve dans une hypothèse où la Safer a un droit de préemption, celui-ci sera prioritaire.

III. Le droit de préemption de la commune et de l’Etat

Un élargissement opéré par la loi du 13 octobre 2014

Le droit de préemption de la commune

L’article L 331-22 du Code Forestier prévoit, en cas de vente de parcelles boisées, un droit de préemption au profit de la commune sur laquelle se situe les biens. Elle doit posséder une parcelle boisée contiguë et être soumise à un document de gestion.

Si le propriétaire est une personne privée, la vente doit porter sur une parcelle inférieure à quatre hectares. Si le vendeur est une personne morale, le droit de préemption s’applique quelle que soit la superficie des biens s’ils sont soumis au régime forestier.

La commune dispose d’un délai de deux mois pour décider d’exercer son droit de priorité.

Si la commune exerce son droit de préemption, le droit de préférence du voisinage ne s’applique pas.

Le droit de préemption de l’Etat

L’article L 331-23 du Code Forestier instaure un droit de préemption au profit de l’Etat. Il peut s’exercer en cas de vente d’une parcelle classée en nature de bois de moins de quatre hectares, lorsqu’une forêt domaniale touche la parcelle mise en vente.

Contrairement aux trois autres droits précédemment invoqués, pour lesquels la déclaration d’intention d’aliéner peut se faire par le vendeur (ou le notaire dûment mandaté), la purge du droit de préemption de l’Etat en cas de vente de parcelles boisées de faible superficie revient au notaire chargé d’instrumenter la vente.

Le droit de préemption de l’Etat prime sur le droit de préemption de la commune. Il prime aussi sur le droit de préférence du voisinage.

Qu’il s’agisse du droit de préemption de la commune ou de celui de l’Etat, les textes ne prévoient aucune exception.


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