Le phénomène coopératif est important en France, puisque trois quarts des agriculteurs adhèrent au moins à une coopérative ; et environ 40 % de la production agroalimentaire est assurée par les coopératives et leurs filiales. L’objet légal de la société coopérative agricole est l’utilisation en commun par les agriculteurs de tous moyens propres à faciliter ou à développer leurs activités économiques, à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité.
Les dispositions relatives aux sociétés civiles et commerciales ne sont pas applicables aux sociétés coopératives. En effet, la coopérative est une société particulière, en ce qu’elle ne poursuit pas de but lucratif mais la mission exclusive du développement économique de ses membres, que l’on qualifie « d’associés coopérateurs ». Son régime juridique est fixé par les articles L 521-1 et suivants et R 521-1 et suivants du Code rural et de la pêche maritime.Pour autant, comme dans toute société, le départ d’un membre associé coopérateur pose la question du devenir des parts détenues et des formalités à accomplir. Le réseau RURANOT va essayer d’apporter quelques éclaircissements en la matière.
Les spécificités d’une coopérative agricole
Si à bien des égards une coopérative agricole connaît un mode de fonctionnement similaire à celui d’une société, un certain nombre de caractéristiques l’en distingue nettement.
Est obligatoirement requise la présence d’au moins 7 associés dans la structure. Les statuts doivent impérativement être homologués par le ministère de l’agriculture ; ils fixent nécessairement les modalités de souscription ou d’acquisition des parts sociales pour chaque associé coopérateur, en fonction soit de l’importance des opérations qu’il s’engage à effectuer avec la société, soit de l’importance de son exploitation.
En matière de gérance, un conseil d’administration dirige la coopérative par la prise de décisions en assemblées générales, où chaque agriculteur associé dispose d’une voix.
La particularité des coopératives se traduit également dans la règle dit de « l’exclusivisme » : la coopérative est constituée pour le service exclusif de ses adhérents, qui ont une obligation de livraison et d’approvisionnement, et elle ne peut faire par principe des opérations qu’avec ses associés coopérateurs. Ce n’est qu’à titre exceptionnel, dans la limite de 20 % du chiffre d’affaires annuel, que sont tolérées des entorses à la règle de l’exclusivisme. Diamétralement, les associés coopérateurs disposent d’une marge de manœuvre réduite puisque, d’une part, il leur est interdit d’adhérer à deux ou plusieurs coopératives concurrentes et, d’autre part, chaque sociétaire est tenu de respecter les règles du jeu telles qu’elles résultent des statuts du groupement.
Tout manquement à l’engagement initialement souscrit expose l’associé-coopérateur contrevenant à des sanctions : les pénalités statutairement prévues.
Lorsqu’arrive le terme fixé, le principe est celui du renouvellement du contrat entre le coopérateur et la coopérative, pour une durée égale à celle originellement définie. A l’adhérent qui entend ne pas poursuivre sa collaboration avec la coopérative de le faire savoir en temps utile (3 mois au moins avant l’échéance) à l’autorité compétente (le président du conseil d’administration). Dans cette hypothèse, ses parts sont tout simplement annulées, et on lui restitue le capital versé selon les règles statutaires, ou à défaut des dispositions légales, généralement à hauteur de leur valeur nominale.
Ces règles s’appliquent également en cas d’exclusion d’un associé, et le délai de remboursement maximal est fixé à cinq ans.
Transmission des parts de coopérative en cas d’arrêt d’activité
Tout associé peut décider de céder ses parts, notamment à l’occasion de la transmission de son exploitation. L’associé coopérateur est alors invité à la plus grande prudence quant au sort des parts détenues. En effet, jusqu’en 2007 le sortant était tenu uniquement d’une obligation de moyen : à savoir proposer à son successeur de procéder à l’acquisition des parts de coopérative afin de le remplacer en son sein, sachant que le refus de devenir coopérateur ne pouvait être reproché au partant. Or c’est désormais à une obligation de résultat qu’est tenu l’associé coopérateur transmettant son exploitation ; aussi, en cas de refus du nouvel exploitant de le remplacer au sein de la coopérative, le cédant est réputé démissionnaire et ne peut compter que sur la mansuétude des dirigeants pour échapper aux sanctions prévues en pareille circonstance.
Le Code rural et de la pêche maritime prévoit que « Le conseil d’administration autorise toute cession de parts sociales réalisées entre associés ou au profit d’un tiers dont l’adhésion a été acceptée ». Pour autant, cette cession est obligatoirement refusée lorsque qu’elle a pour effet de réduire le nombre de part de l’associé coopérateur en dessous du minimum requis par les statuts, ou s’il en résulte que la composition du capital social de la société se trouve modifié en méconnaissance de règles légales, comme l’obligation pour les associés de détenir plus de la moitié du capital.
En matière de formalisme, en amont de la mutation le notaire invitera le cédant à lui fournir le « DRE » (document récapitulatif de l’engagement), qui permet de connaître avec précision la nature de l’engagement et le nombre de parts détenues. Le cédant doit signaler la mutation à la coopérative par LRAR, dans un délai de 3 mois à compter du transfert de propriété ou de jouissance des parts, et ce en apportant la preuve de l’offre de ses parts au nouvel exploitant.
Une fois la mutation opérée, le notaire notifiera à la coopérative l’identité et les coordonnées du cessionnaire, afin que la transmission des parts puisse être retranscrite sur un document appelé « fichier des associés coopérateurs ».
Le transfert de parts sociales effectué, le cessionnaire est alors substitué dans tous les droits et obligations du cédant vis-à-vis de la coopérative ; il poursuivra l’engagement du cédant jusqu’à son terme.
Transmission des parts de coopérative en cas de décès de l’exploitant
Dans l’hypothèse où l’associé coopérateur viendrait à décéder, à l’ouverture de la succession le notaire interrogera la coopérative afin de connaître : le nombre et la valeur des parts nominales souscrites ; la nature de l’engagement collectif et les obligations contractuelles en résultant ; la durée et la date de l’adhésion ; les statuts de la coopérative et le règlement intérieur.
Si suite au décès les héritiers reprennent l’exploitation, le notaire notifiera à la coopérative l’identité et les coordonnées du ou des héritiers qui reprennent l’exploitation. En cas de reprise par une indivision, le notaire communiquera l’identité du gérant. A savoir que la coopérative ne pouvant refuser l’héritier successeur, il n’y a pas lieu à agrément par le conseil d’administration ; en revanche, en cas d’indivision, le gérant doit être au préalable agréé par le conseil d’administration.
Si l’exploitation du défunt est reprise par un tiers, qui continue l’engagement d’activité au sein de la coopérative, alors le notaire notifiera (pour le compte des héritiers) à la coopérative l’identité et les coordonnées du repreneur, en vue de son admission, et lui confirme (preuve de l’offre faite) que ce tiers souhaite reprendre les parts sociales de la coopérative et poursuivre l’engagement d’activité. Le conseil d’administration se prononce sur l’admission ou le refus du nouvel exploitant. En cas de refus (motivé), les parts sociales seront remboursées entre les mains du notaire pour le compte de la succession. Reste l’hypothèse où l’exploitation du défunt, associé coopérateur, est reprise par un tiers mais qui ne reprend pas à son compte l’engagement d’activité auprès de la coopérative. Toujours dans un délai de 3 mois à compter du transfert de l’exploitation, le notaire va écrire par LRAR à la coopérative, pour le compte des héritiers, pour lui communiquer l’identité et les coordonnées du repreneur, en rapportant la preuve qu’une offre de reprise des parts de coopératives lui a été faite mais qu’il l’a décliné. Attention, l’engagement coopératif continue alors de peser sur les héritiers, qui ont intérêt à démissionner sans tarder et se soumettre à la procédure de retrait prévue par les statuts.
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